Faute grave d’un chauffeur ? Attention au temps de réaction de l’employeur !
Pour licencier un chauffeur pour faute grave, le temps de réaction de l’employeur doit être très court. C’est que rappelle la Cour d’appel de RENNES dans une décision rendue le 4 mars 2021. On fait le point !
1. Le temps de réaction de l’employeur doit être très court sinon la faute grave ne tient pas !
A l’origine de l’affaire jugée par la Cour d’appel de RENNES, un chauffeur poids lourd commet plusieurs fautes de conduite.
En particulier, il effectue un demi-tour au volant de son semi de 16 mètres de long en sortie de courbe sur une route départementale fréquentée et accidentogène. Et surtout, en effectuant cette manœuvre le chauffeur met son camion « en portefeuille » sur la route et s’enlise dans la boue sur le bas‐côté.
Dans cette affaire ce n’est pas le caractère fautif des agissements reprochés au chauffeur qui pose problème; c’est le temps de réaction de l’employeur.
En effet, celui-ci va attendre 7 semaines pour engager la procédure de licenciement pour faute grave.
Trop long pour la Cour d’appel de RENNES qui rejette la faute grave (CA Rennes, 4 mars 2021, n°17/05659).
De ce fait, même si les agissements du chauffeur constituent bien une faute, il a droit à son indemnité de licenciement et à son préavis :
« Compte tenu ainsi du temps de réaction de l’employeur, il ne peut être retenu la qualification de faute grave ayant rendu impossible la poursuite entre les parties de l’exécution du contrat de travail avec la nécessité du départ immédiat du salarié sans indemnités »
A l’inverse, si le temps de réaction de l’employeur avait été court, la Cour aurait sans doute validé la faute grave.
L’explication est en réalité très simple.
2. Les critères de la faute grave
La Cour de cassation définit la faute grave par la réunion de 3 éléments :
- fait ou ensemble de faits imputables au salarié personnellement (Cass. Soc. 23 février 2005, n°0-46271)
- fait(s) qui constitue(nt) une violation d’une obligation contractuelle ou un manquement à la discipline de l’entreprise. La faute grave ne peut être retenue pour des faits étrangers à la relation de travail (Cass. Soc. 25 avril 1990, n°87-45275)
- faute qui rend impossible le maintien du salarié dans l’entreprise (Cass. Soc. 27 septembre 2007, n°06-43867)
Parmi ces 3 critères, le dernier est absolument essentiel.
3. La nécessité d’une rupture immédiate
Les juges sont constants sur ce point : pour licencier un salarié pour faute grave suppose temps de réaction de l’employeur réduit.
Ainsi, la cour de cassation refuse de valider la faute grave quand l’employeur tarde à sanctionner. Même s’il a engagé la procédure dans le délai de prescription de 2 mois (voir par exemple Cass. Soc. 7 avril 1993, n°91-42340).
Dans ce cas, le salarié a alors droit au paiement de l’indemnité de licenciement et du préavis.
Et ici la décision de la Cour d’appel de RENNES l’illustre parfaitement.
En revanche, si le temps de réaction de l’employeur est court, le licenciement pour faute grave peut être validé (voir par exemple mon article « Vitesse inadaptée : licenciement d’un chauffeur PL validé« ).
Lire aussi mon article « Licencier le salarié qui perd son permis… c’est légal ?«
Bonjour. Un conducteur ouvre les portes de sa semi frigo au poste garde au lieu d’attendre d’arriver à quai. Resultat, lors de la prise de températures la marchandise est refusée.
Quelles sanctions possibles envers ce salarié et dans quel délais ?
Cordialement. KB
Bonjour, pour aller au disciplinaire c’est 2 mois à compter des faits ou de leur découverte par l’employeur. Si besoin prenez rdv https://lejeune-avocat.fr/prendre-rendez-vous-en-ligne/ A bientôt sur ce blog, Etienne LEJEUNE
bonjour,
si un conducteur refuse de faire sa carte conducteur alors que l’entreprise lui oblige est ce que que l’on considère ça comme une faute grave ?
Bonjour, oui c’est possible! Après en droit du travail c’est toujours du cas par cas… Si besoin prenez rdv avec moi : https://lejeune-avocat.fr/prendre-rendez-vous-en-ligne/ A bientôt sur ce blog, Etienne LEJEUNE